Dès sa prise de pouvoir, l’actuel Chef de l’Etat Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi s’est engagé résolument à l’application de l’article 43 de la Constitution. Lequel article stipule « Toute personne a droit à l’éducation scolaire. Il y est pourvu par l’enseignement national. L’enseignement national comprend les établissements publics et les établissements privés agréés. La loi fixe les conditions de création et des fonctionnements de ces établissements. Les parents ont le droit de choisir le mode d’éducation à donner à leurs enfants. L’enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les établissements publics ».
Cependant, l’effectivité de cette gratuité pose un sérieux problème dans les établissements privés agréés. Outre les classes pléthoriques dans les établissements publics de l’Etat, les privés quant à eux, ne sont pas disposés à appliquer la disposition constitutionnelle sus évoquée.
La plupart des établissements privés agréés sont du ressort de l’Eglise Catholique Romaine qui s’écarte de sa mission sociale, celle de placer l’homme au centre de son développement. D’une part, elle s’insurge contre l’Etat mauvais payeur des fonctionnaires, d’autre part, elle fixe les frais de scolarité au-delà des rémunérations même des agents publics de l’Etat. Ces derniers majoritaires qui envoient leurs enfants étudiés dans ces établissements. C’est tout le paradoxe de l’Eglise Catholique Romaine qui n’est pas en réalité aux côtés des faibles.
Le cas le plus illustratif, c’est notamment celui en rapport avec les parents des enfants de l’Ecole Primaire 1 et 2 du Collège Boboto. Cette école est avant tout, celle des missionnaires jésuites. Elle dispose de 11 salles de classe de première année pour un total environ de 330 élèves.
Pour l’année scolaire passée soit 2018-2019, les Jésuites avaient fixé les frais scolaires annuels à 460 dollars par élève et ce, en dehors des frais de l’Etat. Par un simple calcul arithmétique, les jésuites de l’Etablissement scolaire Collège Boboto ont encaissé au moins 151.800 dollars, rien que pour la classe de Première primaire. Par ailleurs, la prime mensuelle d’un enseignant nage autour de 300 dollars, soient 504.000 dollars convertis en Francs congolais au taux de 16.8 le dollar.
A ce taux, le total annuel des primes se situerait autour de 39.600 dollars pour les 11 enseignants de la première année. Ce qui ne représente qu’un peu plus du ¼ du total encaissé, alors qu’officiellement cela est la raison principale de la contribution des parents. En soustrayant les 39.600 dollars au 151.800 dans les 11 classes primaires de 11 enseignants, il reste 112.200 restants. L’opinion nationale, les analystes et les experts en éducation s’interrogent de la destination de ces 112.200 dollars, sans compter les classes montantes.
L’éducation nationale vraie business
Il est vrai que l’éducation coûte chère, en tenant compte justement du pouvoir d’achat de chaque société humaine. En République Démocratique du Congo, le pouvoir d’achat est trop faible pour scolariser les enfants. 80% de la population vit sous le seuil de 1 dollar par jour. Avec ce faible taux de pouvoir d’achat, l’Etat du moins conscient de ses responsabilités à formaliser la gratuité de l’enseignement dans la loi fondamentale.
De ce qui précédé, il y a de quoi se demander la destination de ces 112.200 dollars restants de 11 classes de 11 enseignants.
Il semble que ce serait cela le nerf de la guerre. Selon nos sources, une partie importante a été versée à la Congrégation missionnaire de Jésuites qui, en ce temps où les sources traditionnelles de financement de l’Eglise Catholique Romaine ont tari, a trouvé là un moyen sûr de survie. Comme on peut donc le constater, derrière la motivation des enseignants se cachent, en réalité, des intérêts divers. Facile donc à deviner qui tire les ficelles dans l’ombre ?
De sources bien crédibles, on apprend même que les congrégations missionnaires et les diocésains n’émettraient pas sur une même longueur d’onde sur cette question de la gratuité de l’enseignement.
Au collège Boboto par exemple cette année scolaire 2019-2020, tous les élèves de Première Primaire ont été obligés de payer la somme de 460 dollars avant d’être inscrit, dès le mois de juin, avant même la rentrée scolaire proprement dite. Peu importe si cela devait laisser sur les carreaux des centaines d’enfants des environs dont les parents n’ont pas été en mesure de débourser une telle somme, on comprend réellement qui sont entrain de tirer les ficelles contre l’applicabilité de l’article 43 de la loi fondamentale.
De ce qui précède, la gratuité de l’enseignement crée un doute quant à son applicabilité, surtout avec l’enveloppe budgétaire votée au Conseil des ministres de 7 milliards de dollars, l’effectivité de la gratuité de l’enseignement requiert au moins 2.9 milliards de dollars. Or, avec l’enveloppe allouée à l’enseignement gratuit selon les experts de l’ordre de 20% pour un budget de 7 milliards, il ressort un montant de l’ordre de 1.4 milliards de dollars. Ce qui indique un déficit de 1.5 milliards s’il faut s’en tenir à ce budget.
Ainsi, le doute sur la gratuité de l’enseignement est réel, sauf la contribution des bailleurs des fonds extérieurs à la rescousse de ce secteur porteur de développement humain.