La Conférence épiscopale nationale du Congo a déployé 40.000 observateurs sur toute l’étendue de la RDC pour surveiller les élections présidentielle et législatives du 30 décembre 2018 selon son Secrétaire Général, l’abbé Donatien Nshole Babula. Une initiative largement saluée par les Congolais pour la transparence des scrutins. Mais la sortie médiatique de Nshole du 3 janvier 2019 dernier est diversement commentée.
Elle a laissé des traces et des stigmates au sein de la classe politique. Les uns sont pour, les autres contre.
L’élément déclencheur de la controverse
En effet, la CENCO via l’abbé Nshole a tenu un point de presse le 3 janvier 2019, soit quatre jours après le vote.
Au cours de son intervention, le Secrétaire Général de la CENCO affirmait connaître le nom du vainqueur de l’élection présidentielle à partir du rapport de la mission d’observation de l’église catholique et enjoignait à la CENI de ‘’respecter le choix du peuple congolais en ne proclamant que celui qui a été réellement élu’’. Pourtant, la Cenco ne détenait que les résultats de 23.000 bureaux de vote sur les 75.000 disséminés à travers le pays, soit moins d’un tiers de résultats jusqu’au 8 janvier 2019. Vérité des urnes, pression sur la centrale électorale, acharnement contre une personne ou contre un groupe d’individus, position personnelle de Nshole, celle de quelques prêtres et évêques ou celle de l’église catholique? Qui a été élu parmi les dix-huit candidats restés en lice? C’est le mystère entretenu par l’église jusqu’à ce jour. Même après la proclamation des résultats provisoires par l’institution habiletée, l’abbé Nshole, loin de la mission de l’Eglise de prêcher la paix, est en train de poser les jalons d’une insurrection populaire que Martin Fayulu n’a pas pu obtenir contre la machine à voter. D’où, une certaine agitation.
Le Front Commun pour le Congo (FCC), plateforme qui soutient Emmanuel Ramazani Shadary, dauphin de Joseph Kabila, avait déjà réagi en mettant en garde la Cenco contre toute manipulation de l’opinion. Le pouvoir accusait ainsi le rapport de la Cenco de partialité et de parti pris en faveur d’un camp politique. En filigrane, le FCC voyait dans cette démarche, une préparation des esprits à un éventuel soulèvement populaire. La loi veut que la CENI proclame les résultats provisoires et la Cour constitutionnelle les confirme. Le reste relève de l’anarchie et constitue une violation flagrante de la loi, indique-t-on au FCC.
Qui a vendu la mèche quant au nom du gagnant ?
D’après certaines sources, Nshole aurait contacté certaines chancelleries occidentales basées à Kinshasa. C’est ainsi que l’information aurait fuité à partir d’une ambassade. L’agence Belga a obtenu la nouvelle auprès d’un diplomate et a transmis sa dépêche à la RTBF qui a annoncé le nom de Martin Fayulu comme vainqueur. De même, NewYork Times a également publié la même information. Contactée par certaines sources, la rédaction de ce grand média américain, a décliné la responsabilité des faits allégués dans cet article dont l’espace a été acheté par un certain Nyembo, proche de Moïse Katumbi que tous les médias occidentaux présentent comme poids lourd alors qu’il a fui de faire la prison qui est la voie tracée pour la plupart d’Opposants avant d’accéder au pouvoir.
Il convient de noter que pendant cette période, les fakenews sont légion et prennent parfois l’ascendances sur la vraie information. Cependant, on peut se poser certaines questions : L’abbé Nshole a-t-il été vraiment dans certaines ambassades pour parler de l’élection présidentielle ou pour autre chose? Si oui, a-t-il cité le nom de Martin Fayulu ? Quand et dans quelle ambassade précisément? La RTBF s’est-elle trompée ou a-t-elle altéré la vérité ? Si Nshole n’a rien dit et fait, pourquoi n’a-t-il pas apporté un démenti ou un droit de réponse ? S’il s’est agi d’une erreur, pourquoi la RTBF ne l’a-t-elle pas corrigée ?
Au-delà de l’évangile, on fait la politique.
La réaction de Fayulu qui accuse Nshole
Après la publication des résultats provisoires à l’élection présidentielle, le candidat Fayulu n’a pas fait attendre sa réaction. Une réaction qui accuse une complicité avec la CENCO ou avec l’Abbé Nshole.
Pour Martin Fayulu Madidi, la victoire du candidat de Cap pour le Changement, «CACH», ne reflète pas la vérité des urnes.
Il demande dans la foulée ‘’à la Conférence Épiscopale Nationale du Congo et à l’Église du Christ au Congo de dévoiler le nom du vrai gagnant’’.
«Levons-nous tous ensemble comme un seul homme pour protéger notre victoire, protéger la victoire du peuple congolais. Main dans la main poursuivons ce combat jusqu’au bout. Convaincu comme l’a dit Rossy Mukendi que le peuple gagne toujours et le peuple gagnera. À tous ceux qui ont pris connaissance de la vérité des urnes, particulièrement à la Conférence Épiscopale Nationale du Congo et à l’Église du Christ au Congo à travers vos observations historiques, nous vous demandons de révéler au peuple congolais et au monde entier le nom de la personne qui a réellement incarné le choix de notre peuple», a déclaré Martin Fayulu.
CENCO : une sous-traitance de Lamuka
Si l’on doit aborder les faits sous cet angle, il est possible de croire que la CENCO, soit quelques trois Evêques ou prêtes, seraient une sous-traitance de Lamuka.
Olivier Kamitatu a annoncé que sa plateforme avait mis à la disposition de ses militants 40.000 Smartphones, lesquels semblent avoir été donnés aux 40.000 observateurs de la CENCO qui ont, au lendemain de l’élection du 30 décembre, envahi les réseaux sociaux avec des procès verbaux fabriqués dans les laboratoires de Lamuka à Bruxelles qui publiaient les résultats de l’élection présidentielle donnant Fayulu largement au dessus. Ce qui peut avoir justifié la coupure de l’Internet et des SMS.
Cenco prise en otage par trois individus
Pire, l’Eglise catholique compte 52 diocèses en RDC, comment expliquer que 2 ou 3 Evêques ou Prêtres engagent l’ensemble de l’Eglise ? Ne sont-ce pas les individus qui se cachent derrière les soutanes pour la défense de leurs propres intérêts au détriment de l’intérêt de toute la communauté catholique ? Comment comprendre leur position devant la scène au point de se confondre aux politiciens ?
CENCO financée par l’UE pour observer les élections
Lorsque l’on considère que le gouvernement de la RDC a refusé tout appui logistique ou financier de la communauté internationale dans l’organisation de ces élections et que l’Eglise accepte de recevoir ce financement pour l’observation électorale de la part des Etats comme Suisse, Suède, Belgique ou France dont les multinationales ont maille à partir avec le gouvernement congolais depuis la promulgation du nouveau Code minier, il y a lieu de craindre le pire. Parce que ces Etats n’ont pas financé cette observation par amour pour les Congolais. Mais dans l’intérêt de leurs propres entreprises qui exploitent dans notre pays les ressources naturelles. C’est donc facile à comprendre.
Surtout que depuis un temps, le Vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères de la Belgique, se fait passer plus comme garçon de course de monsieur Moïse Katumbi au détriment des affaires de son Etat dont le Gouvernement a rendu sa démission au Roi dernièrement.
Où est la vérité alors ?
Puisque l’église affirme que les résultats ne sont pas conformes à la vérité des urnes, pourquoi Nshole ne peut donc pas publier les résultats compilés par ses observateurs au lieu de les confier aux communicateurs de Lamuka pour embraser la toile ?
L’histoire se répète
L’histoire se répète avec l’ombre du Cardinal Monsengwo qui plane sur l’Abbé Nshole. En 1992, alors que l’on était à un pas de l’organisation de l’élection présidentielle, Monseigneur Monsengwo, alors Archevêque de Kisangani et Président de la CNS, va initier une troisième voie qui va maintenir Mobutu au pouvoir jusqu’en 1997. Cette troisième voie n’avait favorisé que son ami Kengo qui partagerait avec sa famille de gros intérêts dans le Groupe Bolloré. Une dénociation qui a coûté à notre confrère Mike Mukebayi une peine de 11 mois de prison ferme à Makala. D’aucuns vont jusqu’à croire que cette attitude dans le chef du prélat catholique serait dictée par une haine viscérale qu’il vouerait à l’ethnie dont Etienne Tshisekedi est issu à l’époque favori de l’emporter, pour privilégier ainsi la prolongation du mandat du Président Mobutu, comme il l’a répété depuis 2012, pendant qu’il l’avait lui-même stigmatisé :’’Les résultats à l’élection du 28 novembre 2011, n’étaient ni conformes, ni justes à la vérité des urnes’’.
En 2012, certaines langues s’étaient déliées pour affirmer que le Cardinal Monsengwo ne visait pas le rétablissement de la vérité des urnes, mais plutôt l’annulation des élections pour permettre une fois de plus à Kengo d’assumer l’intérim du Président de la République.
L’Eglise catholique n’est pas apolitique
L’Eglise catholique est la seule au monde qui dispose d’un statut d’observateur aux Nations Unies. C’est un Etat dans un Etat disposant d’un Gouvernement composé de Secrétaires d’Etat, accréditant des Ambassadeurs (Nonces apostoliques) dans tous les Etats où il a de bonnes relations diplomatiques. A un certain degré, l’Eglise catholique répond aux injonctions de certains lobbies tant au niveau politique qu’économique. Ce n’est donc pas gratuit que certaines positions sont prises en violation même des dispositions constitutionnelles, légales et réglementaires régissant le processus électoral dans un pays souverain.
En Amérique latine, le Saint Siège a soutenu les dictatures contre les Prêtres défenseurs de la théologie de la libération consistant à lutter contre la pauvreté. Pour les intérêts de certaines multinationales qui exploitaient les fidèles catholiques, le Saint Siège s’est opposé à ses prêtres en s’alliant aux bourreaux de ses fidèles.
Les affaires dans l’Eglise
La Banque du Vatican, est la plus grande institution bancaire au monde, hébergeant des comptes de plusieurs multinationales ou grands dignitaires dans le monde dans une opacité sacrée.
D’où, la vérité des urnes dont parle Nshole ne devrait pas être considérée comme une vérité biblique surtout que certains Prêtres et Evêques disposent des actions importantes dans différentes multinationales dont les filiales sont établies en RDC. Un candidat à la présidentielle a été même poussé par un Evêque pour perturber le processus électoral. Il est allé réclamer auprès de Félix Tshisekedi le remboursement de sa caution déposée à la CENI avec intérêt de 100% pour lui apporter son soutien
Nous y reviendrons
Nicole Kakes/CP